13- Amoureux de l'Islam, croyant en Jésus - Paolo Dall'Oglio

Publié le par Paulfeuillesdautomne.over-blog.fr

  • PaoloDall-Oglio.jpgPaolo Dall'Oglio, que nous avons rencontré au Monastère de Marmoussa le 2° jour de notre voyage, est de plus en plus connu. Il réfléchit profondément son expérience de rencontre entre chrétiens et musulmans et en arrive à rêver d'une relation toute nouvelle faite d'accueil, de respect et d'enrichissement mutuel. J'ai lu quelque part que 'Rome' , d'abord proche de la désapprobation, serait désormais dans une attitude bienveillante devant cette recherche. La préface de ce livre par Régis Debray est très belle.
Les notes ci-dessous ne sont qu'un résumé, ou plutôt un choix de citations.

 

L’Islam, un rempart face au totalitarisme chrétien
                        L’immense mérite de l’Islam à mes yeux est d’avoir mis en échec le projet politique chrétien impérial... Je suis conscient du risque d’amalgame et des simplifications qui peuvent amener à une dérive idéologique. Je porte en moi, je ressens, je souffre d’un scandale et d’une fièvre. Le scandale de la faillite de l’Église par rapport à la pauvreté évangélique, par rapport à un être disciple de Jésus de Nazareth, le fils de Dieu, qui n’est pas démontrable autrement que par la pratique… Et une fièvre, la jalousie pour l’Église, sa beauté et sa fidélité.  C’est cette fièvre-là qui me pousse à l’Islam. Je ne me convertis pas à l’Islam, car la conversion est à Dieu. Mais la relation à l’Islam produit en moi une crise et me propose un défi que je sens être dans le prolongement de ce scandale ressenti…. L’Islam a créé un mur face au totalitarisme intégriste de l’Europe chrétienne et constitue également une critique du sécularisme laïc occidental. En disant cela, je ne voudrais pas consacrer une vision idéalisée de l’Islam car, il faut bien l’avouer, l’histoire de l’Islam est faite de contradictions graves et de souffrances. Je crois beaucoup plus aux fonctions réciproques de critiques et d’inspirations des différents corps religieux civilisationnels les uns envers les autres. Il est tout de même essentiel de reconnaître que dans l’histoire de l’Islam  il y a eu une tolérance substantielle envers les juifs et les chrétiens… Il me semble honnête d’admettre que la tolérance musulmane est fondée sur la reconnaissance du fait que les communautés juives et chrétiennes ont été établies par Dieu, seul Maître de l’Histoire et de sa conclusion.
Il y a eu également dans l’histoire musulmane des dérives de pouvoir terribles et il est sain que des historiens musulmans en dressent la liste et en décrivent l’horreur… Que les historiens musulmans d’aujourd’hui soient tous dans une attitude de justification et d’apologie est un mythe parmi d’autres. (p.44)

Crise de la conscience chrétienne face à l’Islam

                        La chose la plus saine que l’Islam nous ait apportée, c’est de nous mettre en échec par rapport à la sacralisation du pouvoir. L’Islam stoppe la prétention du Christianisme à constituer la société parfaite, finale, eschatologique. Déjà dans l’art du Moyen Àge et de la Renaissance, le Christ est représenté en empereur. L’Antéchrist lui ressemble alors beaucoup dans les signes du pouvoir.. Ce drame de la contradiction entre le fait d’être disciple de Jésus de Nazareth et celui d’appartenir à l’Église du pouvoir, a amené l’âme évangélique de Charles de Foucauld à purifier sa foi catholique, son appartenance à la civilisation occidentale, à son nationalisme français, à son aristocratie même, au fin fond du désert musulman… Je suis frappé de voir chez beaucoup de jeunes croyants musulmans une grande soif religieuse de justice et une vraie capacité de critique aux pouvoirs sacralisés de leur société….
Dieu merci, il y a un effet de mise en échec réciproque qui provoque une crise de purification pour nous tous. Le Christianisme a été mis en crise profonde, dans son propre espace culturel, par les dérives nationalistes fascistes et par le communisme qui ont pavé de mort les quatre continents. Les mouvements colonialistes s’étaient conjugués aux appartenances catholique et protestante pour servir des intérêts impérialistes nationaux.
… L’histoire musulmane, comme l’histoire chrétienne, est comme traversée par un désir de purification de l’autorité de sa soif du pouvoir, de revendication de justice, de promotion des classes défavorisées de la société, au nom de la vraie religion, la pure.
Certes, les mouvements populaires d’Amérique latine, les théologies de la libération, ont mis en crise de l’intérieur le Moloch christianisé, reconnu comme tel par exemple par l’évêque martyr Oscar Romero. Mais c’est l’Islam qui, jusqu’à aujourd’hui, représente devant l’occident qui se veut des racines chrétiennes, la masse de contenance la plus efficace et la plus choquante. (p. 45/46)


Double appartenance, un seul appartenir
                        J’affirme ici mon appartenance à l’Église catholique conduite par les successeurs de l’apôtre Pierre. J’affirme également la nécessité pour chaque génération de participer au combat pour purifier l’Église des structures idolâtres du pouvoir. Je suis tenté de faire une déclaration semblable pour l’Islam. Il ne s’agit pas de se désolidariser de la Oumma, mais plutôt de participer à un renouvellement de l’Islam qui a sa racine dans la sincérité du Prophète et de ses premiers compagnons. Les fruits de ce renouvellement sont aujourd’hui portés par le désir d’authenticité et de justice des musulmans défavorisés.
Mon appartenance à Jésus de Nazareth me pousse à appartenir à l’Islam. Le combat contre le fondamentalisme, l’intégrisme et l’instrumentalisation de la religion doit être transversal aux appartenances religieuses. C'est-à-dire qu’il doit intéresser autant le monde chrétien que le monde musulman… et tous les autres….
Ma double appartenance correspond au fil rouge de ma vie. L’Église, passionnée d’universalité et amoureuse des richesses spirituelles des peuples m’a envoyée couler la pâte de mon identité chrétienne dans le moule de l’Islam… Cela implique l’effort de communication nécessaire pour expliquer cette évolution identitaire autant auprès de l’Église que de l’Islam… Il est essentiel de s’ouvrir et de participer de façon dialogale à l’avènement de l’Unique dans la multiplicité contingente des mille facettes de sa gloire. (p. 48)

Une Église pour l’Islam
                        Il y a des chrétiens de différentes origines qui ont conscience de vouloir constituer l’Église du Christ en milieu musulman. Certains sont nés dans ce milieu musulman, d’autres relèvent de ce milieu, quelques-uns y ont émigré ou encore y ont été envoyés. Leur communauté ne veut pas s’opposer à ce milieu musulman, n’est pas en concurrence, se veut en sa faveur. Est-ce de la pure fantaisie ? Non, c’est de la théologie sur l’Église. Ces chrétiens ont conscience d’être une Église chrétienne pour l’Islam ou une Église de l’Islam…
Le musulman est-il choqué par l’expression ‘Église pour l’Islam’ ? Aura-t-il l’impression qu’on veut incorporer l’Islam à l’Église ?  J’ai souvent entendu des musulmans du proche Orient parler des minorités chrétiennes arabes en disant ‘nos chrétiens’, les chrétiens de notre société musulmane qui forme avec nous une seule communauté culturelle, mais aussi cultuelle, car de différentes façons, nous adorons le seul Dieu. (p. 50-51)

Le sacrement du bon voisinage
                        Il existe déjà une Église locale profondément inculturée en milieu musulman. Elle est représentée par les Églises orientales historiques en milieu arabe, turque, persan, etc. Je voudrais insister sur la valeur théologique du bon voisinage, le sacrement du bon voisinage. Je pense immédiatement aux 14 siècles de vie commune entre chrétiens orientaux et musulmans, sans oublier les juifs. Au niveau de la vie de tous les jours et au travers et en dépit des lois alimentaires et culturelles qui séparent les communautés, c’est une vraie convivialité, commensalité, qui s’installe. .. L’aspect théologique vient du fait qu’il est impossible de vivre côte à côte avec des personnes que nous considérons comme soumises à satan. Comment imaginer de vivre ensemble, de jouer ensemble, en croyant que mon compagnon de jeu est destiné à l’enfer ? Et encore, comment vivre dans l’estime réciproque en considérant la religion de l’autre et sa foi comme vaines ? Au-delà des dogmes de condamnation réciproque, le bon voisinage dit une espérance bienveillante envers son voisin et indique une voie pour le futur partout où chrétiens et musulmans partagent un même espace de vie et de travail…
Le problème est que ce bon voisinage est en crise. La participation à une même culture locale s’affaiblit face à l’homologation conflictuelle des modèles culturels. Par exemple, il y a 50 ans, les femmes chrétiennes et musulmanes du village de Nebek étaient habillées de la même façon, la tête couverte, mais rien sur le visage, et très peu de noir en dehors des périodes de deuil. Aujourd’hui, sous l’effet des voyages, le télé… les filles chrétiennes s’occidentalisent jusqu’à la caricature et les musulmanes font ‘à la saoudienne’. L’espace commun se rétrécit et la tradition de partage est oubliée… Une théologie islamo-chrétienne à ce sujet doit être élaborée car autrement la dérive de séparation et opposition s’accélérera.
Il est de notre devoir en effet de rappeler ici les difficultés objectives dont les minorités non musulmanes souffrent dans un milieu légal islamique et qui représente des limites au bon voisinage. (p. 51/52)

Bon voisinage et dépit de la discrimination
                    Les chrétiens des pays arabo-musulmans souffrent d’une discrimination qu’il est difficile de taire et de continuer à subir. L’homme musulman peut épouser une femme chrétienne mais le contraire est interdit : la femme musulmane ne peut se marier qu’avec un musulman… Une autre question évidemment est celle de la discrimination de conscience face à la conversion : tout le monde est libre de devenir musulman, personne n’est libre d’abandonner l’Islam… La réflexion des musulmans européens peut apporter beaucoup au débat. Mon souhait est qu’une entière liberté de conscience puisse émerger d’une réflexion religieuse musulmane et non malgré et contre la religion elle-même. Il en va de la profondeur de cette intériorisation.
En général, les musulmans perçoivent la question de la discrimination autrement car ils considèrent des nombreuses lois issues des sociétés occidentales comme étant l’expression d’une vision chrétienne qui leur serait imposée. La liste pourrait être longue : lois alimentaires, calendrier, héritage, monogamie, loi vestimentaire, etc…. Les sociétés doivent faire des choix qui restent en évolution.  Le bon voisinage, c’est un esprit, une dynamique, et non une série de règles. (p. 53-54)

L’Église des chrétiens arabes
                Paolo dall’Oglio distingue cinq groupes… (p54-55) Il définit le dernier de la manière suivante :
‘le cinquième groupe est très difficile à définir, mais il existe. C’est celui des musulmans, ici arabes mais qui pourraient être d’une autre langue ou nation, qui choisissent d’être chrétiens, de croire en Jésus de Nazareth et par le fait même de constituer l’Église sans sortir ni vouloir sortir de leur appartenance culturelle et religieuse musulmane’. (p. 54)

Des chrétiens musulmans ?
                    Mon propos peut sembler vague par rapport à ce que signifie croire en Jésus de Nazareth. Soit on ne pense pas à sa mort et résurrection et on croit à Jésus comme Messie… et c’est le cas de tous les musulmans. Mais alors ils ne seraient pas tous chrétiens au sens où l’entend l’Église. Autrement, l’hypothèse d’un musulman chrétien évoquerait l’introduction d’un cheval de Troie dans la cité musulmane en vue de l’évangélisation. Faire partie de la Oumma  resterait un fait folklorique (une langue, une culture, certaines pratiques, des symboles) puisqu’en fin de compte le « salut » viendrait de la croyance en la mort et la résurrection de Jésus.
J’accepte le risque de ce malentendu. Je crois profondément qu’il y a des histoires collectives reliées à des identités sociologiques. Et là, la relation à la mort et à la résurrection du Christ peut être plus ou moins cobsciente et engagée. Tandis qu’à côté il y a le mystère des histoires personnelles, des consciences individuelles. Elles peuvent aller dans un sens comme dans un autre : appartenir à l’Église ou laisser l’Église, venir à l’Islam ou s’éloigner de l’Islam…
De fait, aujourd’hui, la plupart des ‘conversions’ de l’Islam vers le christianisme se passent dans une logique d’opposition où l’on passerait d’une fausse religion à une vraie, dans un projet plus ou moins avoué de dépassement – élimination de l’Islam. C’est d’ailleurs ce qui justifie en partie, aux yeux de certains, les réactions violentes du milieu musulman en plusieurs parties du monde contre tout prosélytisme…
Il est possible d’imaginer un réseau humble et discret, non secret, d’hommes et de femmes d’identité musulmane avouée et consciente, qui ont centréleur vie dans le mystère de Jésus de Nazareth, tel qu’il est célébré par l’Église. Pour la plupart, ils ne se connaîtront pas entre eux, ils ne vont pas organiser une Église clandestine, mais plutôt ils exprimeront l’appartenance à une Église mystique, offerte en otage d’amour, comme la levure dans la pâte.
Je ne m’attends pas à un mouvement de masse. Ma prévision n’est pas seulement sociologique. Je dirai que je ne désire pas un mouvement de masse, je m’y opposerai même, car je reconnais sincèrement le statut théologique de la croyance et de la pratique musulmans… Je pense qu’il y a désormais un espace spirituel autant chrétien que musulman pour des âmes qui synthétiseraient dès maintenant des harmonies à venir (p. 55-56)

Les risques de l’évangélisation directe
                    Je suis entièrement conscient de l’impossibilité historique, dans la plupart des cas, d’implanter l’Église dans le contexte proprement musulman à partir d’une évangélisation directe et visant à la pleine incorporation dans l’Église visible de personnes et de populations d’origine musulmane. (p. 57)

L’Église face au syncrétisme
                    … L’Église a du, dès les premiers siècles affronter le risque du syncrétisme et elle a du développer pour cela une méthode pour garder ce qu’elle a jugé relevant de l’essentiel de la foi, pour que cet essentiel ne soit pas perdu dans la rencontre avec d’autres traditions. C’est dans cette logique de syncrétisme en contexte grec que l’Église a pu se préserver de la synthèse gnostique des 1° et 2° s.. Devant les philosophies mystiques du monde ancien, les chrétiens ont dû défendre l’originalité de la foi de l’Église en un Christ vraiment mort et ressuscité, vraiment divin et humain.
Aujourd’hui, l’Église est ouverte au dialogue, mais se méfie du syncrétisme : ‘Nous aussi chrétiens, au long des chemins du monde, nous sommes invités – sans tomber dans le syncrétisme qui confond et humilie l’identité spirituelle propre – à dialoguer respectueusement avec les hommes et les femmes des autres religions qui écoutent et pratiquent fidèlement les indications de leurs livres sacrés, à commencer par l’Islam qui, dans sa tradition, accueille d’innombrables figures, symboles et thèmes bibliques et qui nous offre le témoignage d’une foi sincère au Dieu unique compatissant et miséricordieux » Créateur de tout l’être et juge de l’humanité’. (Message final du Synode sur le Parole de Dieu – 2008)
Il est vrai que  la globalisation culturelle, avec son syncrétisme de supermarché spirituel, constitue un vrai danger pour la richesse, l’originalité et l’authenticité des identités culturelles traditionnelles. On a là l’impression que la mondialisation culturelle provoque une perte de profondeur par rapport à chaque tradition. ((p. 58-59)

Identités dialogales et non conflictuelles
                    Notre petite communauté syriaque – catholique, l’appartenance chrétienne orientale la moins nombreuses, a quelque chose à offrir et nous avons à faire un travail sur notre conscience identitaire, sinon elle se diluera dans d’autres identités plus larges. Esquissons l’histoire de cette petite communauté syriaque. Ce sont des chrétiens venus à la foi à Antioche au moment où l’Église se propage sur tout le territoire de la Grande Syrie. Ils sont  essentiellement de langue araméenne, mais aussi de langue arabe. Ils démarrent leur itinéraire en restant ancrés dans la culture grecque, autant qu’enracinés dans l’hébreu biblique. Cette Église prend peu à peu ses distances avec l’Église byzantine et l’Empire romain en approfondissant sa particularité locale, opposée à l’homologation impériale. Elle s’est ensuite très profondément arabisée par son contact avec l’Islam, en distillant avec les Arabes musulmans et les Arabes juifs une culture sémitique commune pendant 14 siècles. Par rapport à tous ces éléments de cristallisation identitaire, l’Église syriaque catholique pourrait se définir de manière conflictuelle mais aussi d’une façon synthétique et dialogale… (p. 63)

L’inculturation assume la complexité culturelle
                    Au monastère, nous avons l’expérience d’une résistance de l’Église locale face à la légitimité d’une inculturation de la foi chrétienne en contexte arabo-musulman ; comme si cette démarche mettait en danger le christianisme local, qu’il soit copte, syriaque, byzantin ou arménien… Notre inculturation voudrait dépasser le folklore des vêtements, des tapis à terre, des pieds déchaussés dans l’église et de l’usage courant de l’araboe reconnu comme langue liturgique musulmane. Il s’agit pour nous d’être une semence jetée qui permet à la pâte entière de lever pour la nourriture de beaucoup. Il s’agit de témoigner du mystère de Jésus de Nazareth en faveur des musulmans dans l’aujourd’hui dramatique, douloureux et contradictoire du monde de l’Islam. Eschatologiquement, c'est-à-dire en vue de l’achèvement final du sens de l’histoire humaine, le mystère de l’Église ne peut que faire un avec celui de l’Islam : toute l’harmonie du travail de Dieu en toute tradition viendra à la lumière du soleil du dernier jour… (66)

Le principe herméneutique de l’amour   
                    L’amour chrétien a ses raisons que les logiques humaines ne connaissent pas et annonce des changements qu’historiens et exégètes ne peuvent prévoir. Le grand mystère de l’Islam, celui qui a scandalisé l’Église depuis 14 siècles et qui pose toute une série de questions dramatiques à la conscience contemporaine, ne peut être interprété selon le principe de non contradiction ; il doit l’être selon le principe herméneutique de l’amour. Depuis le 11 Sept 2001, il n’est permis à personne de rester identique à lui-même, ni dans le monde musulman, ni dans le monde chrétien : une interprétation courageuse et eschatologique des textes sacrés s’impose. (66)

Interprétation eschatologique
                    Nous avons besoin d’un nouveau prophétisme, un prophétisme en dialogue, interreligieux, dans notre expérience toujours nouvelle de l’action de l’Esprit de Dieu, dans l’espace sacré de notre rencontre, de notre hospitalité réciproque… Il y a analogie entre le refus du judaïsme d’accepter Jésus comme Messie, un refus auquel St Paul reconnaît un rôle dans le dessein mystérieux de la Providence, avec le refus de l’Islam du Christianisme. Ce mur irréductible entre l’Islam et le Christianisme protège la communauté musulmane d’une assimilation prématurée qui éteindrait son charisme, et protège l’Église de la tentation impérialiste… Certains musulmans tendent à se replier dans une rigidité héréditaire… Pendant ce temps, de nombreux chrétiens orientaux ne parviennent pas à sortir de la logique de la défense identitaire. Ce qui les conduit aujourd’hui à l’émigration ou au cantonnement… Les musulmans ne représenteraient à nos yeux de chrétiens, autant orientaux qu’occidentaux, qu’un cul-de-sac de l’histoire, d’où il faudrait simplement revenir en arrière, à la source des vérités fondamentales, avant l’évènement déviationnel représenté dans cette conception par la prophétie Muhammadienne, évidemment accusée d’être fausse et jugée comme mal intentionnée ou au mieux d’être naïve ou illusoire ; ce qui revient à dire : le pauvre Muhammad s’est trompé.
Au contraire, par l’herméneutique de l’amour, engagée dans un futur qui dépend d’une responsabilité spirituelle partagée, le courant de l’espérance remonte l’histoire et part annoncer des bonnes nouvelles à nos ancêtres dans la foi. Ils seront consolés dans leurs préoccupations pour leurs enfants car ils ont arrêté de s’entredéchirer. Nous n’allons pas vers des assimilations réciproques ni vers des mélanges équivoques, mais vers un horizon partagé sur lequel des synthèses capables de pluralisme dans la communion se projettent. (67/68)

Publié dans Le chemin de Damas

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article